Vaccination FCO/MHE – Le point sur la situation

Comment se déroule la campagne dans nos élevages ? Premiers chiffres relevés par le département Epidémiologie et Encadrement sanitaire de l’ARSIA, complétés de réponses du SPF Santé publique à quelques-unes de nos questions.

Sur base des données de vaccinations enregistrées dans SANITEL au 9 avril 2025, le taux de vaccination au sein de la population bovine est estimé à 38,4 % pour la FCO-3, 37,1 % pour la MHE et seulement 4,2 % pour la FCO-8 ( graphique 1 ).
59 % de la population ovine de Wallonie est vaccinée contre la FCO-3 mais seulement 8,2 % de celle-ci est actuellement protégée contre la FCO-8 ( graphique 2 ).
Pour 63 % des troupeaux bovins wallons, AUCUNE donnée de vaccination n’a été transmise dans SANITEL. A contrario, 5,2 % des troupeaux ont finalisé l’ensemble des vaccinations imposées par la Loi ( FCO-3, FCO-8 et MHE ) ( graphique 3 ).
En termes de troupeaux ovins, 1,6 % d’entre eux ont finalisé les vaccinations contre les 2 sérotypes visés par cette campagne ( FCO-3 et FCO-8 ). Il faut toutefois souligner que ce pourcentage est basé sur le nombre de troupeaux ovins renseignés comme « actifs » dans SANITEL dont une partie sont des troupeaux qui ne détiennent plus de moutons.


L’ARSIA a souhaité rencontrer l’autorité responsable de l’organisation de la campagne de vaccination qu’est le SPF Santé publique, Sécurité de la Chaine alimentaire et Environnement. Elle remercie le Dr Hélène Gérard, Vétérinaire à la Direction Politique Santé Animale et Végétale pour ses éclaircissements apportés à nos questions suivantes


Pourquoi la vaccination est-elle obligatoire ?

Pour ne pas revivre en 2025 un été identique à celui de 2024 !
Choisir de rendre la vaccination obligatoire était l’option la plus efficace dans un aussi court délai.
L’épidémie de l’année dernière a fortement marqué les éleveurs et les vétérinaires qui se sont sentis impuissants face à l’arrivée de la FCO3. Cette épidémie a eu, et a toujours de lourdes répercussions financières. Les éleveurs en constatent encore les conséquences ; avortements, retours en chaleur et euthanasies à la naissance font toujours partie de leur quotidien.
Les éleveurs ne sont pas les seuls à avoir été impactés : les associations, dont l’ARSIA, et l’AFSCA, ont vu leurs budgets s’évaporer en un temps record. Cette épidémie a mis en péril leurs moyens financiers pour assurer toutes les autres missions qui leur reviennent : c’est tout un système qui a été touché.
La vaccination est la seule arme réellement efficace dont nous disposons face aux maladies vectorielles. L’obligation vise surtout à renforcer la solidarité entre éleveurs en essayant de limiter la circulation des virus et donc des vecteurs infectés. Cette solidarité concerne également toutes les autres parties impliquées. C’est une décision que le ministre a prise à la demande des éleveurs et des vétérinaires.
L’obligation permet aussi de donner des garanties aux fabricants de vaccins pour qu’ils produisent et envoient vers la Belgique les doses nécessaires à la vaccination de notre cheptel : c’est la loi de l’offre et de la demande. L’obligation, et le financement qui l’accompagne, sont un signal fort à leur intention.


Pourquoi la vaccination RESTE obligatoire alors qu’on n’est pas certain qu’il y aura assez de doses ? ( surtout de FCO-8 )

Il faut que ce soit clair : on ne va pas suspendre l’obligation de vacciner.
Les doses de vaccins FCO8, que certains vétérinaires ont commandé très tôt ( en décembre pour la majorité ), tardent à arriver, c’est vrai. En décembre 2024, plus aucun fabricant ne produisait de vaccins contre la FCO8. Nous les avons motivés à le faire à nouveau. Nous sommes en contact permanent avec eux et selon les informations fournies, les doses attendues vont arriver dans les semaines qui viennent.
Vacciner contre la FCO8 est la priorité absolue dès que les vaccins arrivent. Des cas de BTV8 ont été identifiés dans le Nord-Pas-de-Calais et avec les températures douces que nous connaissons, ce sera une course contre la montre pour vacciner tous les animaux à temps.
Abandonner l’obligation maintenant, ce serait aussi rompre le pacte de confiance établi avec tous les maillons de la chaîne d’approvisionnement des vaccins : les vétérinaires qui se sont engagés financièrement vis-à-vis de leurs fournisseurs, qui en ont fait de même vis-à-vis de fabricants.
Il faut être conscient qu’à l’avenir, il faudra faire face à d’autres maladies vectorielles.
Si ces acteurs, qui se sont engagés, qui ont pris des risques économiques pour la Belgique, voient les règles changer en cours de jeu, ils réfléchiront à deux fois avant de répondre à nos demandes.


Pourquoi n’est-on pas passé par un achat groupé de vaccins ?

Nous avons beaucoup discuté autour des avantages et des inconvénients d’un achat groupé de vaccins, en tenant compte des circonstances dans lesquelles nous nous trouvions.
En octobre 2024, quand la décision de rendre la vaccination obligatoire a été prise, le gouvernement était en affaires courantes. Cela signifie qu’il fallait commencer la campagne dans un contexte de blocage budgétaire. Les différentes étapes pour créer un achat groupé de vaccins auraient pris beaucoup trop de temps dans ce contexte.
Un achat groupé doit respecter les règles qui s’appliquent à tous les marchés publics au niveau fédéral. Cela impliquait 3 appels d’offre ( un pour chaque maladie ) et autant pour leur distribution. L’ensemble des démarches administratives aurait pris au minimum 2 mois, et après, il fallait encore un délai de 2 à 3 mois minimum pour que les vaccins arrivent sur le marché. Nous aurions eu les premiers vaccins au plus tôt début mai. Aujourd’hui, même si on attend toujours les doses de FCO8, les vaccins FCO3 et MHE sont disponibles en suffisance.
De plus, l’achat de vaccins par un marché public limite le choix des vaccins avec des conséquences qui pouvaient être problématiques.
Pour la FCO 3 et la MHE, il restait encore de nombreuses questions sans réponse.
Par exemple, les discussions étaient encore en cours pour savoir quels vaccins pouvaient être utilisés en vue d’une certification.
Autre problème : il était toujours possible que les autorisations temporaires accordées à certains vaccins en urgence soient suspendues ou remplacées par d’autres types d’autorisation : c’est d’ailleurs ce qui s’est passé pour un vaccin.
Au moins, actuellement, le détenteur et le vétérinaire restent libres de choisir le vaccin qui leur convient, en fonction du cas spécifique de l’élevage.


Pourquoi les indemnités passent par les VT et pas directement aux éleveurs ?

Ce système a été retenu pour deux raisons principales.
La première était de permettre l’achat des vaccins par les vétérinaires. Pour les vétérinaires, cela représentait une somme colossale à avancer avant même d’être payés par les éleveurs. En procédant de cette manière, les vétérinaires disposaient d’une avance pour l’achat des vaccins alors que la plupart n’était pas en mesure de le faire sur fonds propres.
La seconde est liée au budget disponible pour la campagne : en limitant les frais secondaires, nous souhaitions allouer l’intervention la plus favorable possible pour les détenteurs. Nous avons donc décidé d’employer une application déjà utilisée pour le paiement des vacations vétérinaires. Cette application est déjà utilisée pour le paiement des actes liés à la mission d’épidémiosurveillance : prises de sang lors du winterscreening, notification des avortements, etc… Développer une application spécifique pour le paiement ou engager du personnel pour assurer le suivi des dossiers manuellement aurait coûté beaucoup plus cher.


Quelles sont les conséquences pour ceux qui ne vaccineront pas ?

D’un point de vue individuel, la conséquence principale pour ceux qui ne veulent pas vacciner est l’impact de ces maladies sur leurs troupeaux et les conséquences économiques qui s’en suivent. Il faut mettre en perspective le coût et le bénéfice d’un tel choix.
Rattraper les animaux en prairie demande beaucoup d’efforts, c’est vrai, mais les pertes d’un troupeau en termes de productivité, de mortalité ou d’infertilité, sont bien plus conséquentes.
Evidemment, le fait de ne pas vacciner ou de vacciner partiellement son troupeau ne donne pas droit à l’intervention prévue.
D’un point de vue collectif, comme dit plus tôt, non seulement le refus de vacciner met en péril la protection du cheptel belge, mais il met aussi en difficulté notre système de police sanitaire et nos perspectives pour le futur.
Dans ce cas, des sanctions sont prévues par la législation, comme le blocage de l’exploitation ( impossibilité d’acheter ou de vendre des animaux ) et l’obligation de faire vacciner les animaux, aux frais du détenteur.
Nous comptons sur le bon sens et l’esprit solidaire des éleveurs pour ne pas avoir à en arriver là.


A mi-parcours, quelles sont les premières leçons de cette campagne ?

Cette campagne a un côté complètement inédit.
Pour la première fois en Belgique, nous appliquons le principe du « mieux vaut prévenir que guérir » et nous vaccinons massivement et obligatoirement contre des maladies qui ne sont pas encore présentes sur le territoire, ( c’est à dire la FCO8 et la MHE ).
C’est la première fois aussi qu’un tel budget est débloqué pour soutenir une campagne de vaccination, et ceci, en affaires courantes.
Je retiens la collaboration précieuse et la ténacité de toutes les parties concernées : les éleveurs, les vétérinaires, les associations de lutte contre les maladies avec l’ARSIA pour la Wallonie, la DGZ pour la Flandre, l’AFSCA, l’AFMPS, les firmes pharmaceutiques ( qui ne sont tenues à aucune obligation en la matière ) et les collaborateurs du SPF Santé publique et du cabinet du ministre Clarinval. Tout le monde fait bloc, met de côté ses divergences, afin que la campagne aboutisse.
La campagne est aussi un exercice grandeur nature en matière d’épidémiosurveillance, elle rappelle à chacun les règles qui s’appliquent aux missions officielles.
Par exemple, un détenteur est censé pouvoir rattraper ses animaux à tout moment à la demande des autorités.
Enfin, cette campagne montre l’importance du vétérinaire d’épidémiosurveillance et de son suppléant. Il semblerait que peu d’éleveurs ou vétérinaires aient conscience que seul le vétérinaire d’épidémiosurveillance peut délivrer ou administrer les vaccins contre ces maladies. Pourtant c’est prévu par la législation depuis 2008 déjà pour la FCO, et la MHE depuis cette année.
Quand un détenteur signe une convention avec un vétérinaire, c’est un choix important : il ne peut pas ensuite faire son marché entre ce dernier et son suppléant. Le suppléant n’intervient pour les missions officielles que si le vétérinaire principal l’a mandaté pour cette mission.
Tout ce travail est certainement utile en guise de préparation face aux autres menaces, comme le risque d’apparition de fièvre aphteuse ( ndlr : voir article ci-dessous ).
Je voudrais conclure en remerciant toutes les personnes qui s’impliquent avec énergie dans l’ombre de cette campagne et insister sur l’objectif premier : rendre service aux éleveurs et non les contraindre.

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